Qui ne suis-je pas ?
Je ne suis pas vivant, ou si peu, si rarement.
Je ne suis pas un sage, un doux, un calme, un modéré.
Je ne suis pas un paisible, un confiant, un solide, un olivier.
Je ne suis pas un gentil, un sympa, un ouvert d'esprit, un cultivé.
Je ne suis pas un érudit, un homme de lettres, un savant fou, un
illuminé.
Je ne suis pas monogame, hétérosexuel, Blanc, Européen,
Français.
Je ne suis pas fidèle, marié, bon père, bien
éduqué.
Je ne sais pas ce que sont les femmes, si elles sont humaines ou d'une
espèce éloignée.
Je suis sûrement masturbateur, érotomane et obsédé.
Je ne sais pas ce qu'on appelle érotisme, sexualité,
il faut donc dire que je suis queer et parfois un peu gai.
Je ne suis que l'époux-phénix d'une fille de peu, une fille de
feu,
une fille de joie, une fille de peu de foi,
une princesse de charbon au cœur de diamant bien taillé.
Je suis peut-être un Ulysse en éternel retour vers sa
Pénélope abandonnée.
Je ne suis pas dévot, pas religieux, pas chrétien, pas
baptisé.
Car les mots ont tôt fait de nous tromper, de nous ruiner, de nous
détruire.
Nos représentations sont partielles, flasques, mouvantes.
Je marche avec Celui qui Est, Celui qui se Dit, s'Offre, se Donne, se Reçoit, se fait connaître comme Toute-Relation. Je cherche donc à entrer dans une aventure relationnelle qui me dépasse, me traverse, me submerge, me terrasse, m'élève. Je n'avance pas au rite, à la norme, à l'injonction morale, mais au Désir, au Cri dans le désert des Cœurs, à l'épée à deux tranchants dont l'un se nomme : liberté, choix, volonté, aventure, croissance, épanouissement, et l'autre : grâce, don, offrande, émerveillement, brûlure, soulèvement, amour gratuit, surprise éternelle, et pour tout dire : Nouveauté !
Je ne suis ni scientifique, ni universitaire, ni ingénieur, ni
technicien, ni programmeur, ni professeur, ni formaté, ni formateur.
Je ne crois ni au Progrès, ni à l'Éducation des masses, ni
aux Machines, ni aux Ordinateurs.
Je crois que les scientifiques les plus avancés sont des fous qui se
cachent, car ils croient, c'est l'évidence criante, en
l'intelligibilité du monde, en son harmonie fascinante,
pétillante, exaltante, déroutante.
Je ne suis pas politicien. Je ne crois pas aux mots, alors encore moins aux
discours ! Je n'aime ni les sermons, ni les curés de gauche comme de
droite, ni les catéchismes anarchistes, socialistes, communistes,
centristes, affairistes, nationalistes, alter-mondialistes,
écologistes...
Je crois que la majeure partie des discours politiques
ne sont que les sous-produits d'idées métaphysiques non
éclaircies, non pensées, non discernées.
Je ne suis pas un communiquant, un rédacteur, un journaliste. Je ne crois pas en l'information neutre et vérifiée. Il n'y a qu'un discours : celui qu'on cherche à imposer, pour se rassurer, pour s'encourager, pour tenter d'étayer les murs d'une société qui craque et n'en finit pas de s'effondrer dans une Chute interminable.
Je ne suis pas écrivain, philosophe, poète, littérateur. Je suis un athée du langage, un déçu de la pensée, un convaincu de l'illusoire et du passager.
Je ne suis ni peintre, ni chanteur, ni musicien, ni humoriste.
J'existe bordel ! Et je ne suis pas celui que vous croyez !
Je suis un artiste, puissant, noble, sensible et fier !
Acteur ? Peut-être. Tricheur, sûrement.
Charmeur ? Peut-être. Menteur, sûrement.
Magicien ? Peut-être. Illusionniste, sûrement.
Fou ? Peut-être. Instable, sûrement.
Car ce que notre être laisse transparaître, apparaître au cours du temps, n'est que lueurs fugaces et étincelles vaporeuses ; je ne suis stable, c'est évident, que dans mon instabilité, ce qui ne peut que faire de moi, c'est certain :
un équilibriste de la vie,
un artiste de l'instant.
Samuel D'Olivier
15 janvier 2020.